mercredi 15 avril 2015

Jacques Halbronn, Sociologie du milieu astrologique

Sociologie du milieu astrologique :
les cycles de la vie astrologique
par Jacques Halbronn


Par vie astrologique, nous entendons le milieu astrologique, selon une formule que nous avons introduite en 19841 et qui, depuis, a été largement reprise par les uns et par les autres.

Notre propos est ici d’essayer de comprendre astrologiquement ce qui se passe chez les astrologues et comme on dit, les plus mal chaussés ne sont pas ceux que l’on pense. Nous utiliserons bien entendu, pour ce faire, notre propre modèle, celui de l’astrologie axiale.2

Tous les quinze ans, la vie astrologique est marquée par des affrontements, des déchirements susceptibles de laisser des cicatrices durables. Nous étudierons donc le phénomène sur une période d’environ 50 ans, ce qui correspond à quatre moments forts de la vie astrologique française / francophone, correspondant à quatre conjonctions axiales successives.


La période 1956 - 1961

On peut considérer que dans l’histoire du CIA (Centre International d’Astrologie), fondé en 1946, cette période favorisa une sorte d’OPA d’André Barbault (né en 1921) sur les sources vives de cette association. Du fait d’un rapprochement avec les Editions du Seuil, autour de F. R. Bastide, parut alors la collection Zodiaque dont les collaborateurs, sous la houlette de Barbault, vice-président, étaient largement recrutés au sein du CIA.

Par ailleurs, A. Barbault en se rapprochant d’Alexandre Volguine (1904 - 1976), responsable des Cahiers Astrologiques, qui deviendraient ainsi l’organe du CIA, fut ainsi en mesure, par cet autre moyen, de contrôler les membres du CIA, constituant ainsi un Etat dans l’Etat, sans pour autant aboutir à la rupture.


La période 1971 - 1976

Période où certains se détachèrent du CIA (Centre International d’Astrologie) pour créer ou développer leur propre structure, ce fut le cas du CEFA (Centre d’Etude et de Formation en Astrologie), du GERAS (Groupe européen de recherche en astrologie scientifique), du MAU (Mouvement astrologique Unifié), mais aussi de la revue L’astrologue.

Ces différente entités nées dans la mouvance du CIA tendirent à s’autonomiser et à non seulement ne plus dépendre du CIA mais à se mettre en compétition avec lui ou entre elles.

C’est vrai pour André Barbault qui en 1968 avait lancé une revue qui avait vocation à être l’organe du CIA et qui, du fait de conflits avec le CIA, considéra la dite revue comme n’ayant plus de compte à lui rendre. A la place, le CIA fonda la revue Trigone, dirigée par Jacques Berthon (né en 1926), jusqu’à son départ à la fin de 1973 et auquel nous succédâmes, début 1974.

C’est vrai pour Jean-Pierre Nicola (né en 1929), qui fit du CEFA, initialement l’école collégiale d’astrologie du CIA une entité tout à fait distincte et qui prendrait par la suite le nom de COMAC, qui se référe explicitement à l’astrologie conditionaliste.3 Quant à J. Berthon, ancien professeur du CEFA, il fondera sa propre structure d’enseignement, l’ESAP (Ecole Supérieure d’Astrologie de Paris).

C’est vrai pour Patrice Louaisel (né en 1949), qui fit du GERAS, initialement le groupe de recherche - le laboratoire - du CIA, une association Loi 1901 bien distincte, publiant la revue Astrolabe (jeu de mots sur Laboratoire astrologique et sur l’instrument d’observation) , qui se changera en 1982 en Astralis.

C’est vrai pour Jacques Halbronn (né en 1947), vice-président du CIA, qui fonda en 1975 une association, le Mouvement astrologique universitaire, s’appuyant sur une partie des membres du CIA. Le MAU comporta très tôt sa propre école d’astrologie, la Faculté Libre d’Astrologie de Paris (FLAP). Mais la séparation MAU - CIA s’explique par certaines manoeuvres qui aboutirent à ce que J. Halbronn fut délogé de son poste de vice-président.

On pourrait parler à propos des uns et des autres d’une forme de trahison envers une structure qui les avait “nourris” et portés, le CIA, lequel se crut obligé de changer de nom et devint, après quelques péripéties, la SFA (Société Française d’astrologie).


La période 1985-89

Passons à la conjonction axiale suivante qui correspondit sur le plan politique au démembrement non seulement du bloc communiste mais aussi du bloc soviétique. La structure qui à l’époque fut l’objet de perturbations internes, était le GERASH, contrôlé par Maurice Charvet (né en 1947). Comme le CIA, à une certaine époque, cette association avait su attirer des compétences, se constituant ainsi un réseau de responsables locaux. Il semble que P. Louaisel, le fondateur du GERASH ait fait sécession au profit de la FEA (Fédération des Enseignants en Astrologie), qui regroupait nombre des dits responsables, comme Denise Daprey, la présidente (née en 1925) ou Alain de Chivré (né en 1946) eux-mêmes ayant contribué à la tenue de congrès du MAU.

Mais ce n’était pas fini : Jacques Halbronn, par ailleurs responsable du MAU, mais proche de Charvet qui l’avait pressenti pour la vice-présidence du GERASH, du fait des conflits internes au sein du GERASH allait se retrouver à sa tête, ce qui conduira assez vite à des manoeuvres d’auto-dissolution du GERASH. Dans la foulée, M. Charvet créera une nouvelle association, le CEDRA (centre d’étude, de documentation et de recherche en astrologie) au profit de laquelle se prononça l’assemblée générale extraordinaire du GERASH réunie à Lyon, en ce qui concerne ses biens matériels, sans qu’il y ait continuité juridique entre les deux associations. La transmission des dits biens fut, par ailleurs, des plus laborieuses.

Il conviendrait de replacer dans ce contexte, la création de la Fédération Française d’Astrologie (FFA) en 1984 qui, présidée par Danièle Rousseau (née en 1944) se disloqua assez vite, lors de la conjonction axiale.

Là encore, on peut évidemment parler de trahisons entre personnes supposées liées entre elles et des clivages datant de cette époque ou de l’époque antérieurement décrite pèsent sur la vie astrologique actuelle.

On notera qu’à partir des années Quatre Vingt, il n’y a plus d’apport d’une certaine jeunesse comme dans les deux phases précédentes. Les quadragénaires (nés dans les années Quarante) verrouillent le pouvoir et découragent les nouvelles vocations. Une seule exception notable, mais qui ne concerne qu’Internet, est le cas de Pätrice Guinard, né en 1957 mais qui ne parvint à lancer sa structure, le CURA (Centre Universitaire de Recherche en Astrologie, 1999) qu’à quarante ans passés, soit prenant son envol à un âge sensiblement plus tardif qu’un André Barbault, un Patrice Louaisel ou un Jacques Halbronn.


La période 2001 - 2003 et plus

La période actuelle est symbolisée au niveau politique par les tiraillements au sein du camp occidental et notamment entre France et Etats Unis. Les Américains se sentent trahis, puisqu’ils n’ont pas été suivis par Jacques Chirac.

En ce qui concerne, plus modestement, la vie astrologique, on signalera la création en 2001 de la FAES (Fédération des Astrologues de l’Europe du Sud), ce qui est une façon de s’opposer aux astrologues de l’Europe du Nord, jugés par trop dominateurs et condescendants par rapport aux astrologues méditerranéens. La FAES fut constituée en Grèce avec des représentants italiens, français et espagnols. Mais quinze ans plus tôt, un même processus avait été lancé par Jacques Halbronn, la FIMA (Fédération Internationale Méditerranéenne d’Astrologie).

Mais la FAES qui au congrès de Montpellier (juin 2002) avait su rassembler nombre d’associations françaises fort différentes allait assez vite connaître des troubles internes, notamment avec le retrait du CEDRA de Maurice Charvet lequel représentait, avec Y. Lenoble, la France au sein de la FAES d’origine. Nous avons pour notre part représenté à Andorre, en 2001, la FDAF (Fédération des Astrologues de France) d’Alain de Chivré, lors d’un colloque rassemblant des responsables français et espagnols de la FAES mais par la suite, nous avons pris nos distances avec A. de Chivré. Or, le CEDRA est parti officiellement en raison des positions doctrinales de la FDAF, jugées inacceptables, notamment en matière prévisionnelle. Le “couple” Lenoble-Charvet ne fonctionne plus comme avant. Il semble aussi que, par la suite, de graves dissensions se soient manifesté entre membres catalans (Barcelone) de la FAES, comme Ernesto Cordero (né en 1940) et Jaume Martin, responsable de la revue Mercurio - 3.

En outre, le Salon annuel de l’Astrologue de F. Santoni (Auréas), proche de Lenoble et de Charvet, semblerait également faire l’objet de forces centrifuges au niveau de ses exposants. Il est évidemment trop tôt pour faire le bilan de cette nouvelle phase de conjonction axiale qui va susciter des changements dans le paysage astrologique, lequel désormais implique des enjeux au niveau d’Internet. Emblématique du climat conjonctionnel actuel, l’arrêt, inattendu, en 2003, de la parution de la revue L’Astrologue, fondée en 1968 par A. Barbault, dans le cadre des Editions Traditonnelles (ex Ed. Villain et Belhomme, ex Ed. Chacornac).

A contrario, en dehors de ces phases, on assistait à des périodes favorisant l’émergence de nouvelles structures qui ne correspondaient pas à des sécessions mais bien plutôt au dépassement de certains clivages, c’est le phénomène de la quadrature axiale Mais de telles structures sont fragiles et tôt ou tard, en phase conjonctionnelle, elles risquent fort d’être victimes de leurs contradictions internes.

Le milieu astrologique n’échappe pas aux secousses qui parcourent le monde et ce qui se passe à une certaine échelle peut se retrouver à une autre, ce qui est à la base d’une bonne méthodologie des études des rapports entre hommes et astres.


Jacques Halbronn
Paris, le 28 avril 2003

Notes
1 Cf. Guide de la vie astrologique, Paris, Trédaniel, La Vie astrologique, deux vol., Paris, Trédaniel, 1992 - 1995. Retour

2 Cf nos études sur ce sujet sur le Site Ramkat.free.fr et sur la revue en ligne Etoile & Planète. Retour

3 Cf. notre Guide astrologique, Paris, Ed. O. Laurens, 1997. Retour

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